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Une seconde, deux vies

17 novembre 2006

- Ecoute, je t'ai dit au début de notre relation

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- Ecoute, je t'ai dit au début de notre relation que je n'étais pas prête de le quitter tant que tu ne pourrais nous assurer un avenir. J'ai beau ne pas vouloir de cet enfant, il est là, alors je le garde. Si je quitte Shan, je veux être sûre d'avoir le bébé avec moi.
Bravo!! Elle avait tout prévu la garce!! Elle ne voulait pas de cet enfant, mais était prête à tout pour ne pas me le laisser!! Et moi, le vrai moi dans mon rêve, qui ne voyait rien de tout cela, qui ignorait tout!!
Ils ont terminé cette conversation dans le calme, Max un peu abattu, Léo toujours aussi froide et distante qu'elle l'était avec moi.
Puis, il s'est rhabillé, et est reparti aussi vite qu'il était venu. Ils avaient fait ce dont ils avaient envie, sans se soucier de qui que ce soit, et se quittaient comme si de rien n'était, comme si c'était normal.
Ai-je vraiment besoin de vous décrire l'état dans lequel je me suis réveillé? Tout se mélangeait: la rage, la tristesse, le dégoût, la haine...
Pour Léo, ça ne changeait pas grand-chose, mais quelque chose me disait que je ne verrais plus Max de la même façon... Pourtant ce n'était qu'un rêve! C'était horrible! Je ne pouvais quand même pas tenir compte de quelque chose que j'avais vu en rêve dans mes relations avec les gens que j'aimais! Ce n'était plus possible, je ne voulais plus faire ces rêves horribles, je ne voulais pas savoir la suite! J'en avais assez de devoir composer de la sorte!! Comment j'allais faire en voyant mon ami? Je ne pouvais pas ignorer ce que j'avais rêvé, c'était impossible!
J'ai regardé mon réveil: 7h45. Je me suis levé, j'ai pris le téléphone, et j'ai appelé mon médecin, à l'hôpital. Celui qui m'avait pris en charge après mon accident, car il était évident que pour moi, ça avait un lien. Je n'avais pas tous ces rêves étranges avant... Je voulais une explication, et je ne pouvais plus attendre!

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- Docteur Rosoux à l'appareil.
- Bonjour docteur, c'est Shan Ninh Xara ici.
- Bonjour Shan! Comment vas-tu? J'en déduis que si tu m'appelles, c'est qu'il y a un soucis?
- Eh bien... oui.
- Je t'écoute.
- Voilà, depuis quelques temps, je fais des rêves...
- Jusque là, rien d'anormal.
- Oui, seulement... ces rêves, ou plutôt devrais-je dire, ce rêve, est vraiment très réel. Je m'observe en quelques sortes, je suis dans la peau de mon personnage, mais je ne sais rien de ce qu'il s'est passé avant. Et le plus étrange, c'est que chaque fois, ça se suit. C'est une longue histoire, et à chaque rêve, j'en obtiens un petit morceau en plus.
- Je ne pense pas qu'il y ait un problème, Shan, mais si tu veux, on peut faire quelques examens pour te rassurer.
- J'aimerais bien oui. Car... je fais des rêves éveillés aussi. Toujours la suite, mais en pleine journée.
- D'accord.
Le médecin resta silencieux quelques instants. Il tournait des pages, de son agenda sûrement.
- Je peux te prendre début de semaine prochaine, lundi matin.
- D'accord.
J'ai donc pris rendez-vous, impatient de savoir enfin ce qu'il m'arrivait. Il fallait que je trouve une origine plausible à tout ça. C'était tellement irrationnel que ça me bouffait l'esprit. Je ne pensais plus qu'à ça, je ne pensais plus qu'à ma réaction lorsque je rentrerais de ce boulot dont je ne savais rien, auprès d'une femme que je n'aimais plus, enceinte.

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Le reste de la semaine, j'ai été un peu absent, la tête ailleurs, et tout le monde l'a remarqué. Athénaïs était inquiète, mais un peu rassurée que j'aille chez le médecin. Elle voulait sans cesse que je me repose, alors que passer du temps avec elle m'aurait changé les idées.
Ma soeur me téléphonait tous les jours pour savoir comment j'allais, alors que j'aurais préféré aller chez elle pour voir ma petite chérie et penser à autre chose.
Quant à Mouss, elle essayait de me rassurer, comme elle le pouvait, me disant que le médecin trouverait sûrement une solution. Je m'étais attendu à une leçon de morale de sa part, mais rien.
Enfin... Max... je l'avais évité tout le reste de la semaine. Je n'étais pas prêt à le voir, j'aurais trop eu envie de lui mettre mon poing dans la figure, sans qu'il y comprenne rien le pauvre. Mais ça aurait été inévitable. Je virais parano, demandant à Athénaïs si elle n'avait pas des contacts avec lui dans mon dos, disant à Mouss de se méfier d'un type pareil.
La fiction de mon rêve rejoignait dans ma tête la réalité, je ne pensais plus qu'à ça, je pensais en Shan marié et futur père.
Et ça ne pouvait pas continuer. Ces quelques jours jusqu'au rendez-vous tant attendu furent infernaux pour tout le monde. Même pour Xune, à qui je ne parlais plus. Un jour pourtant, et il fallait s'en douter, elle me prit à part et ne me laissa pas d'autre choix que de lui répondre.
- Mais enfin, qu'est-ce que t'as?? Depuis mercredi, tu ne parles plus! J'ai fait quelque chose de mal? Quelque chose est arrivé??
- Non...
- Alors quoi? Shan, merde, réponds! Je suis pas un jouet, tu me dois des explications!
- Ca n'a rien à voir avec toi, je ne peux pas t'en parler. C'est trop compliqué, trop bizarre, et tu me prendrais pour un fou!

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- Non, écoute, fais-moi confiance, ok? Je ne dirai rien.
- Je préfère pas te dire. Je ne veux pas que toi aussi tu en subisses les conséquences.
- Je suis en train de les subir là!
- Tu ne sais pas de quoi je parle, et je ne veux pas que tu saches...
- Ok! Tu m'énerves! Un jour tu me cours après pour me parler absolument, et du jour au lendemain, tu ne m'adresses plus la parole, et j'ai même pas la chance de savoir pourquoi!
- Ne le prends pas comme ça, je t'en prie, c'est déjà assez dur comme ça...
- Adresse-moi au moins la parole alors!
- Ok... mais ne parlons pas de ça.
- Impossible que je te parle de ça, je ne sais pas ce que c'est, le "ça"!! dit-elle en riant à moitié.
- C'est vrai, merci Xune.
- Dis... quand comptes-tu parler de moi à ta copine?
Elle avait dit ça d'un ton léger, sans préavis, comme si ça s'insérait parfaitement dans la conversation.
- Euh... pourquoi tu me demandes ça?
- J'ai bien remarqué qu'il y avait un problème à ce niveau-là. Ta copine est jalouse?
- Non...
- Oui, forcément, elle n'est pas au courant de mon existence. Tu devrais lui dire, ça poserait moins de problème que si elle l'apprend autrement...
- Pourquoi? Il n'y a rien!
- Justement, alors pourquoi tu lui dis pas? dit-elle en souriant, juste avant de tourner les talons et de retourner travailler.

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J'étais sidéré! Elle avait raison, et le savait parfaitement. C'est justement ça qui me mettait en colère. Comment arrivait-elle à lire en moi de la sorte? J'étais pourtant plutôt secret comme garçon, mais elle, elle savait toujours ce que je pensais, comment je réagissais. Elle m'étonnait chaque jour de plus en plus.
Et si je disais ça à Mouss, elle me sortirait encore une théorie à deux balles comme quoi je suis en train de me faire avoir... Pourtant, en réalité, cela me faisait plus peur qu'autre chose... Je ne voulais pas de quelqu'un qui lit en moi comme dans un livre ouvert. Je ne voulais pas qu'elle sache tout de moi, bien plus que ma propre petite amie. J'aimais Athénaïs, alors pourquoi sans cesse ce besoin de me justifier se propageait-il en moi? Pourquoi avais-je peur de lui dire que j'avais une amie, avec qui je passais de bons moments, certes, mais qui n'avaient, c'était certain, aucun rapport avec ceux que je passais avec Athénaïs?
Cette fille, Xune, avait un "pouvoir" sur moi que je ne pouvais m'expliquer, et que personne n'aurait compris, évidemment. Je ne suis même pas certain qu'elle s'en rendait compte elle-même. Mais une petite voix au fond de moi, celle de Mouss, ne cessait de me répéter: "Tu es en train de te faire avoir".
Alors quoi? Xune jouait à un jeu? Elle tentait vraiment de me séduire, ou bien était-ce son caractère, sa manière d'être naturelle? Si vous voulez mon avis, cette Xune avait bien des choses à cacher, elle aussi...

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17 novembre 2006

8. Toute vérité n'est pas bonne à savoir

1

Le mercredi est arrivé aussi vite que mes espoirs de voir mes doutes s'évaporer. Mes rêves ne me quittaient plus, mais curieusement, "l'histoire" n'avançait plus. Je n'avais pas la suite, je ne savais pas si Eleonore accouchait, si notre couple fonctionnait ou si j'avais une fille ou un fils... J'aurais pourtant aimé savoir, car ce rêve était si réel. Inconsciemment pourtant, j'avais peur. Peur de ce que je pourrais découvrir dans ces rêves, peur de ce que je pourrais faire aussi, car je ne me reconnaissais pas.
Je me suis donc préparé, m'habillant normalement, mais élégamment. Athénaïs est arrivée, plus ravissante que jamais, un sourire magnifique aux lèvres. Je savais que ce jour comptait beaucoup pour elle. Notre relation devenait plus officielle. Enfin, je la présentais à ceux qui comptaient vraiment pour moi. Cela signifiait que notre relation était sérieuse, et j'en étais ravi.
M'embrassant, elle me serra dans ses bras comme pour me remercier de lui accorder cette faveur. Mais malgré ma peur de ce que tout cela signifiait, j'en avais autant envie qu'elle, et c'est avec plaisir que je l'ai emmenée chez ma soeur et mon beau-frère. Nous sommes arrivés main dans la main, et avons attendu que quelqu'un vienne nous ouvrir. Après un apéritif succulent et beaucoup trop copieux, nous sommes passés à table, discutant de tout et de rien. Nous bavardions tranquillement.
- Alors Athénaïs, depuis quand es-tu kiné dans cet hôpital?
- Cela va faire un an et demi bientôt. Mais je travaille comme indépendante à côté, pour arrondir les fins de mois.
- Finalement, Shan, me dit ma soeur, si tu n'avais pas eu cet accident, nous ne serions pas là!
C'est alors que tout autour de moi devint flou. Athénaïs, ma soeur et son mari disparurent, le décor changea et une nouvelle fois, je me retrouvais dans cette petite maison, à m'observer comme si un second moi existait et s'était dédoublé.

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Eléonore et moi avions passé la nuit à nous faire des câlins, et le lendemain matin, je me suis réveillé dans ses bras. J'avais une main sur son ventre, et les mouvements du bébé m'ont fait ouvrir l'oeil. J'ai souris, mais je sentais que ce n'était pas de bonheur. Simplement, j'allais avoir un bébé, j'en étais heureux, mais ça s'arrêtait là. Je ne me sentais pas bien dans ce lit, à côté de cette femme qui était la mienne. J'avais simplement envie de fuir, de partir en courant. Et mon bébé? Si je pouvais, je le prendrais avec moi, mais ce n'était pas possible.
Je me suis donc levé, je suis parti dans la salle de bains et je suis resté dix bonnes minutes sous l'eau chaude. Comme si elle pouvait enlever tout ce qui me gênait, comme si elle pouvait me nettoyer de mes péchés. Je ne savais pas ce qu'ils étaient, mais je sentais que je n'étais pas tranquille, que je commettais des fautes envers mon épouse.
Je me suis alors demandé si elle en commettait, elle aussi. Il y avait peut-être une raison à mon comportement si étrange et si peu semblable à ce que j'étais réellement. Je suis sorti et une envie soudaine de partir travailler m'a pris. C'était vraiment inhabituel, mais curieusement, je ne pouvais rien faire contre. Je suis repassé par la chambre, et j'ai laissé un mot à mon épouse, lui disant qu'on m'avait appelé pour une chose importante, mensonge énorme qui s'est inventé sous ma plume, devant mon regard effrayé.
Je suis parti au travail, et ne suis rentré que vers 19h. Mais le pire, c'est que je ne sais pas ce que j'ai fait de la journée car... je n'étais plus dans mon corps. J'en suis en quelques sortes sorti au moment où j'ai passé la porte de la maison. J'ai vu le Shan de mon rêve monter dans la voiture pour aller travailler, tandis que moi, je suis resté là.
Je me suis très vite aperçu que ma femme ne pouvait me voir. Je n'étais qu'un simple spectateur de ma vie.

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Je suis donc monté auprès d'elle, le bruit de la voiture l'ayant apparemment réveillée. Elle s'est levée et a vu mon mot. A mon grand étonnement, un sourire s'est accroché à ses lèvres. Elle a prit le téléphone, et a composé un numéro qu'elle connaissait de toute évidence par coeur, et au bout d'un moment, elle a parlé.
- Mon chéri? Il est parti, tu peux venir...
- ...
- Oui, moi aussi je suis impatiente, je t'attends...
- ...
- A tout de suite mon amour.
J'étais sidéré! Elle... elle avait un amant! Mais quel couple formais-je donc avec elle? Moi au travail, tout du moins, je l'espérais, et elle, se faisant plaisir derrière mon dos! Pas étonnant que je sois malheureux comme une pierre, ma femme me trompait! Bien évidemment, la question que je mourrais d'envie de crier était: avec qui?? L'idée la plus stupide que j'ai pu inventer m'est venue à l'esprit, mais je ne sais pour quelle raison à nouveau, je sentais que j'avais raison. J'étais presque sûr que ma femme me trompait avec mon meilleur ami. Le coup classique, digne d'un film me direz-vous...
Quant à elle, elle s'est précipitée dans la salle de bains. Je l'ai suivie. Se croyant seule, et en réalité, elle l'était presque, si réalité il y avait, elle a pensé à haute voix.
- Comment j'ai fait mon compte pour me faire avoir comme ça? Un bébé! Regarde-moi ça comme t'es moche, avec un ventre énorme!
J'avais envie de vomir! Tout ce ramassis de mensonges m'écoeurait profondément, et je voulais me réveiller absolument!! Me réveiller de ce rêve éveillé!! J'ai alors entendu une petite voix... "Shan? Shan?"

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- Shan? Shan, ça va? Réponds-moi!
Le visage inquiet de ma soeur m'apparut alors et je réalisai où j'étais. Ce rêve avait encore frappé, mais cette fois, en pleine journée ou du moins alors que j'étais éveillé. C'était la première fois. Et tous ceux autour de moi étaient inquiets. Athénaïs et Ling étaient pâles, tandis que Pascal me regardait bizarrement. Je me suis levé et me suis excusé.
- Je reviens, je vais à la salle de bains.
Je me suis regardé dans le miroir, et je n'y voyais pas le même Shan que dans mon rêve éveillé. Là j'étais juste un peu perturbé, mais dans mon rêve, je semblais... abattu. Comme si je subissais ma vie, comme si je ne l'aimais pas. C'est certain, dans mon rêve, je n'étais pas heureux et cela se voyait. Je ne comprenais pas ce qui m'arrivait. Pourquoi faisais-je ces rêves qui se suivaient et surtout, pourquoi cela arrivait-il en pleine journée?
Essayant de me rassurer, je suis retourné à table, où tout le monde m'a regardé comme une bête de cirque.
- Ca va Shan? me demanda une nouvelle fois Athénaïs.
- Oui, oui, ne t'inquiète pas, lui ai-je répondu.
Mais je me posais la même question qu'elle: comment allais-je? Il fallait peut-être que j'aille voir un médecin, pour savoir si j'avais quelque chose. Peut-être que ces rêves avaient une origine physique, ou qu'un médicament pourrait m'aider.
Nous avons passé la fin de la soirée à discuter, mais je voyais bien que tout le monde, y compris moi, se tracassait.

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Puis je suis allé voir ma petite chérie, ma filleule. Elle venait juste de se réveiller et ma soeur me fit le plaisir de me permettre de lui donner le biberon. La petite Yumiko était une pure merveille, avec les magnifiques yeux bleus de son père et les cheveux noirs et raides de sa mère. Ce moment fut un des plus émouvants de ma vie, jamais je n'aurais cru y être déjà autant attaché alors que je ne la connaissais pas. Je suis resté un long moment à la contempler, en compagnie d'Athénaïs, à la cajoler et à la caresser. Mais la petite se rendormait, alors nous sommes redescendus, et nous sommes apprêtés pour partir.
J'ai reconduit Athénaïs chez elle, elle avait insisté pour que je me repose et que je passe une bonne nuit. Je n'ai pas discuté et me suis exécuté.
De retour chez moi, je me suis laissé tomber sur le canapé et j'ai soupiré un bon coup. Je ne savais déjà pas où j'en étais avant, mais là c'était le bouquet! J'ai entendu une porte s'ouvrir doucement. Mouss écoutait. Sans doute ne me croyait-elle pas seul. Après quelques secondes où elle ne put que constater le silence, elle osa d'une petite voix: "Shan?"
- Moui? lui ai-je répondu.
Elle descendit alors les marches de l'escalier et vint me rejoindre, se laissant tomber aussi lourdement que moi dans le pauvre divan qui s'en prenait ce soir plein la figure.
- Alors? Raconte! me dit-elle, sachant très bien qu'il y avait quelque chose qui clochait.
Je me suis alors décidé à lui en parler...
- J'ai fait un rêve éveillé...
- Et?
- Et ce n'est pas normal! Tu t'absentes souvent de la planète pour aller vivre une autre vie dans tes rêves toi?

6b

- Euh... vu sous cet angle... non.
- Moi si!
- Pourquoi, ça t'est déjà arrivé?
- Eveillé, c'était la première fois, mais mes rêves sont si réels qu'ils me foutent les boules!
- Tu devrais te reposer...
- Mais je ne veux plus, je ne veux plus faire ces rêves!
- De toute façon, même éveillé tu les fais...
- Tu...
Je n'ai même pas eu le courage de répondre. Après tout, elle avait raison. Si même éveillé, ces rêves étaient présents, je pouvais dormir, ça ne changeait rien. Je n'évitais plus rien du tout en ne fermant pas l'oeil. Je me suis donc levé, j'ai souhaité une bonne nuit à mon amie, et je suis allée dormir.
Comme je le redoutais, la suite ne s'est pas fait attendre...
Eléonore était toujours dans la salle de bains, à se faire belle comme jamais elle ne l'avait fait avec moi. Une autre question m'est venue à l'esprit (voilà que je réfléchissais en dormant maintenant): pourquoi restait-elle avec moi? Mais je n'ai eu la réponse que quelques instants plus tard.
La petite sonnette installée à la porte d'entrée s'est fait entendre. Léo a enfilé un peignoir plus que suggestif  et est descendue à toute vitesse ouvrir. Je ne fus même pas surpris de voir Max à l'entrée. Elle l'a agrippé par le col, et l'a embrassé à pleine bouche, devant mes yeux. Il a répondu à son baiser sans aucune gêne apparente, et sans un mot, ils sont montés dans MA chambre, sur MON lit... inutile de vous raconter la suite, je ne suis évidemment pas resté pour voir ça!

7b

Je suis descendu dans le salon, et me suis laissé tomber sur un fauteuil. Mon dieu... et me voilà qui parle de Dieu alors que je n'y crois pas, c'est vous dire.
Ce fut étonnamment très rapide, et les deux tourtereaux sont très vite venus me rejoindre. Ils sont allés dans la cuisine manger un morceau, "ces choses-là, ça creuse"... a dit Max. Non mais quel idiot!
Je le ai rejoint, curieux de voir de quoi ils pouvaient bien parler...
- Léo (alors il l'appelle comme ça aussi lui?), quand vas-tu te décider à le quitter?
- Quand tu auras de quoi me faire vivre, ainsi que ce marmot inutile. Je te l'ai déjà dit!
- Mais l'argent n'est pas le plus important!! Je veux que tu vives avec moi! Je veux te voir librement, j'en ai marre de me cacher. Je te rappelle que Shan est mon ami!
Elle se mit à rire bruyamment.
- Tu plaisantes? Un ami ne couche pas avec la femme de l'autre! S'il est ton ami, je ne vois pas ce que tu fais ici.
Pour une fois, j'étais d'accord avec elle... s'il croyait être encore mon ami après ça, même si apparemment je n'aimais pas ma femme...
- Je n'y peux rien si je suis tombé sous ton charme, tout comme lui! J'ai simplement eu la malchance d'arriver après lui!
J'ai failli m'étouffer! Heureusement qu'ils ne pouvaient m'entendre. Comment osait-il dire des choses pareilles? Ce n'était pas possible? Où était le Max que j'adorais, qui ne tombait presque jamais amoureux d'une fille et n'aurait trahi son ami pour rien au monde?

30 juillet 2006

"Finalement, je veux quand même prendre le

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"Finalement, je veux quand même prendre le risque de te connaître. A condition que tu m'aides à ne pas tomber sous ton charme. Si tu es d'accord, rendez-vous dans le parc à gauche."
Comme un idiot, j'ai regardé sur ma gauche, et j'y ai vu un bâtiment.
"Imbécile... elle voulait sûrement dire à ta gauche en sortant du restaurant!"
Je me suis alors mis dans la bonne position, et j'ai regardé sur ma gauche. J'ai vu tout de suite le parc, et j'y suis allé sans me poser de questions. Pourtant, j'aurais peut-être dû...
Quoi qu'il en soit, je l'ai trouvée assise sur un banc, rêvassant. Elle était vraiment belle. Je suis arrivé en silence et je me suis assis sans dire un mot. Elle fit de même, et je me demandais combien de temps ce petit manège allait durer. Enfin, elle daigna me regarder.
- Alors tu es venu? Ca m'étonne.
- Pourquoi?
- On ne peut pas dire que j'ai été d'une sympathie qui ne t'aurait laissé aucune hésitation.
- C'est vrai.
- Alors pourquoi tu es là? me demanda-t-elle sur un ton vexé et cassant.
Je souris. Elle le vit.
- Si c'est pour te foutre de moi...
- Tu es susceptible!!
- Et alors?
- Je n'ai rien dit! m'exclamai-je.
Elle poussa un souffle d'exaspération. Moi, je m'amusais comme un fou. Pour une fois que j'avais le dessus avec elle, je trouvais ça drôle. Cette fille était vraiment extraordinaire de par son caractère et sa volonté d'avoir raison en toutes circonstances.

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- Sérieusement, pourquoi tu es comme ça?
- Comment?
- Agressive.
- Je ne suis pas agressive, je suis... naturelle.
Je ne pus m'empêcher d'éclater de rire.
- Tu commences à m'énerver! s'écria-t-elle, mais je sentais dans le son de sa voix que ça l'amusait autant que moi. Son air faussement outré et son petit sourire au coin des lèvres le prouvaient.
- Tu me réponds?
- De quoi? mentit-elle.
- Pourquoi tu es comme ça.
- Je ne sais pas moi! Je suis comme ça, c'est tout. Tu es venu simplement par curiosité? Je ne suis pas une bête en cage qu'on peut admirer sans plus de considération. Si je t'ai invité ici, c'est pour qu'on se connaisse et qu'on devienne amis, mais tu rends vraiment les choses impossibles!
- Tu ne manques pas d'air. Tu râles sur tout ce que je dis. Si tu prenais un peu moins la mouche... peut-être qu'on pourrait parler.
Elle ne répondit pas, ce qui signifiait apparemment dans son langage que j'avais raison.
- Alors, pourquoi tu travailles au restaurant?
- Parce que j'ai besoin d'argent, dis-je non sans ironie.
Elle soupira.
- D'accord, parce que j'ai dû arrêter temporairement mes études, et que mes parents ont décidé de ne plus me donner d'argent suite à ça.

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- A quoi?
- Au fait que j'ai arrêté.
- Ben c'est normal, ils vont pas te donner de l'argent pour ne rien foutre!
- Oui mais ce n'est pas un choix d'avoir arrêté.
- Ah bon?
Je lui expliquai alors mon accident et tout ce qui suivait, mais je n'ai pas mentionné Athénaïs, je n'y avais même pas pensé.
- Sympa les parents...
- Comme tu dis. Et toi?
- Oh moi...
- Ah non! Tu ne triches pas! Tu me dis!
- Bon... eh bien... je voulais être comédienne, alors je me suis lancée dans les casting et autres trucs du genre, mais sans grand succès. Pendant ce temps-là, j'ai mangé toutes mes économies, du coup, fallait bien que je me trouve un job. Comme je n'ai aucune formation, j'ai rien trouvé de mieux.
- Ce n'est pas si mal.
- Non, mais j'aspirais à autre chose.
- Tu as abandonné les casting?
- Oui, je peut-être pas faite pour ça après tout...
- Qu'en sais-tu?
- Je n'ai jamais été choisie...
- Peut-être simplement n'es-tu pas encore tombée sur le truc qui te convient. Si tu ne cherches plus, c'est certain que tu ne trouveras jamais.
Je m'étonnais moi-même de sortir des trucs pareils. "Faites ce que je dis mais pas ce que je fais!"

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- Bof, je crois pas que ça marcherait.
Je n'en dis pas plus à cet instant, car je voyais bien que ça ne servait à rien d'insister. Je regardai ma montre par hasard et vit l'heure plus que tardive.
- Mince, faut que j'y aille, je vais encore être crevé demain.
- Ok, alors bonne nuit et à demain.
- Bonne nuit.
Je suis reparti vers ma voiture. J'étais vraiment étonné et stupéfait par cette fille. Pourquoi était-elle comme ça? On aurait dit qu'elle avait plusieurs personnalités en elle, ou plutôt plusieurs facettes complètement opposées. Elle était en apparence agressive, mais en la voyant raconter son existence qui ne lui convenait pas, on sentait chez elle une blessure, et par le fait même une sensiblité bien plus développée que ne le montraient les apparences.
Elle gagnait vraiment à être mieux comprise et connue, et c'est ce que j'avais envie de faire.
Arrivé chez moi, je vis quelqu'un qui attendait devant la porte. Je sortit et reconnus enfin la personne: Athénaïs.
- Bonsoir, lui dis-je en m'approchant d'elle et en l'embrassant.
- Bonsoir.
C'était froid, elle était en colère.
- Ca va?

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- Où étais-tu? Ca fait une heure que je t'attends!
- J'étais au restaurant, mentis-je à moitié.
C'est vrai, après tout, j'étais tout près et je discutais simplement avec une collègue.
- J'ai téléphoné au restaurant pour savoir à quelle heure tu terminais, et c'était il y a une heure... alors je ne veux pas faire le détective, mais j'aimerais simplement avoir la vérité.
- En fait, j'étais bien au restaurant jusqu'il y a une heure, et puis j'ai discuté avec un collègue, je n'ai pas vu le temps passer.
Je ne sais pas pourquoi, mais je sentais que si je disais la stricte vérité, ça allait me faire des ennuis. Pourtant, j'avais bien le droit de discuter avec Xune après le travail, je ne savais pas qu'Athénaïs viendrait ici, je n'ai rien fait de mal. Mais je sentais vraiment qu'il valait mieux lui cacher pour l'instant que c'était une fille. Ca me mit mal à l'aise, je ne voulais pas lui cacher des choses, mais elle allait le prendre mal sans raison et je n'en avais aucune envie.
- Et puis si j'avais su que tu serais là, je me serais dépêché de rentrer. Tu aurais dû prévenir.
Et c'était vrai.
- Je voulais te faire une surprise! s'exclama-t-elle, vexée, et au bord des larmes.
- Eeeeh, mais te mets pas dans des états pareils, dis-je avec tendresse en la prenant dans mes bras. C'est très touchant, j'apprécie ton geste, ne t'inquiète pas. Je suis désolé.
Elle se calma un peu et se serra un peu plus contre moi. C'était un geste que j'adorais, des plus réconfortants.
- Allez viens, ne restons pas dehors.

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On entra et on alla directement dans ma chambre (où soit dit en passant, j'avais mis un lit deux places depuis que mes parents m'avaient supprimé mon argent et que j'étais avec Athénaïs).
Je la pris à nouveau dans mes bras, et je lui caressais tendrement le visage. Elle me regarda alors d'un air amoureux, puis m'embrassa. Je la laissais faire, décidé à me laisser guider par elle, ne voulant pas la brusquer et cherchant à voir où elle en était dans sa tête.
Elle se fit plus pressante dans ses baisers, plus habile de ses mains et c'est sur le lit qu'elle me guida. Sa main passa dans mes cheveux, et elle m'attira vers elle en tirant sur la petite chaîne que je portais. Elle m'enleva mon pull et me caressa longuement, avant que je ne fasse de même et que ça n'aille plus loin...
Après, je fis alors semblant de m'endormir, car je n'avais pas envie d'une discussion sérieuse suite au moment de complicité que nous venions de passer. Je savais qu'elle allait se méfier, je ne sais pas comment, mais je le savais.
Je n'avais en réalité rien à me reprocher mais je sentais si bien que quelque chose la gênerait si elle savait que c'était en réalité avec une collègue que j'avais passé une heure de mon temps. Comment savais-je ça? Je n'en sais rien, mais j'en étais persuadé.
Le lendemain matin, je lui ai apporté le petit-déj' au lit pour la mettre de bonne humeur, et je lui ai parlé du dîner chez ma soeur prévu le mercredi.
- Oh c'est sympa de sa part ça. Je vais la revoir dans un autre contexte, beaucoup plus joyeux, ça me fait vraiment plaisir.

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- A moi aussi, j'ai hâte de te présenter à eux de manière plus officielle.
Elle sourit. Je me réjouissais vraiment d'être mercredi, pour revoir leur bébé et aussi pour présenter Athénaïs, on allait passer une bonne soirée, je le sentais.
Le week-end et le début de semaine se passèrent calmement, sans grand évènement. Avec Xune, on se parlait gentiment, mais ça s'arrêtait là, et avec Athénaïs, tout allait pour le mieux quand on arrivait à se voir.
Rien que d'en parler de cette façon, j'ai l'impression de mener une double vie. Je me sentais coupable, alors que très honnêtement, ce n'était pas le cas. J'aimais Athénaïs de plus en plus, et tout allait très bien, et Xune devenait peu à peu une amie, mais je n'avais vraiment aucune arrière pensée. Je la trouvais jolie, c'est certain, mais ce n'est pas un crime, si? Je n'avais en aucun envie que ça aille plus loin, simplement parce que j'aimais celle avec qui j'étais, et que ça me suffisait amplement.
Alors pourquoi ce sentiment d'être en faute? Pourquoi cette culpabilité? Et pourquoi ce regard accusateur d'Athénaïs alors qu'elle ne savait rien?

30 juillet 2006

7. Entre amour et amitié

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- Non, me répondit-elle sur un ton neutre.
- Oh… alors… est-il au courant ?
- Non plus.
- Hum… super pratique dis-moi.
- Ne te moque pas. Ce n’est pas si simple.
Tout cela ne me surprenait guère. Après tout ce qu’elle m’avait dit et ce que Max m’avait dit également, il n’aurait pu en être autrement. Dommage qu’elle ne soit pas au courant que l’homme de ses rêves la trouvait à son goût. Mais bien sûr, j’allais y remédier… bientôt.
- Pourquoi pas si simple ?
- Parce que… c’est Max, tu le connais, et...
- Et ?
- Et j’ai bien peur que nous n’ayons pas les mêmes objectifs dans les relations amoureuses.
- Tu crois ? dis-je ironiquement.
- Ne me sors surtout pas le "Je t’avais prévenue" sinon je te tue, me dit-elle avec un air menaçant.
- Tu comptes lui en parler quand au juste ?
- Je ne compte pas lui en parler, dit-elle très sérieusement, fixant très attentivement son assiette.
- Mouss… Comment veux-tu que quelqu’un comme Max se rende compte que tu es amoureuse de lui ? Et franchement, je ne dis pas ça méchamment, mais si tu espères qu’il te déclare sa flamme, c’est raté, ce n’est pas du tout son genre.
Elle reçut ma remarque en plein dans la figure, j’avais donc vu juste. Il était donc temps que je la rassure un peu.

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- Ecoute, dis-je avec conviction, tu dois lui parler. Je crois que Max n’est pas indifférent à ton charme et… quoi ?!
- Arrête de te moquer ! me dit-elle avec un petit sourire, après m’avoir gentiment frappé le bras...
- Sérieusement, je pense que Max t’aime… bien. Je ne peux pas être certain à 100%, parce que justement ce n’est pas le genre de choses dont il parle. Si tu n’engages pas la conversation avec lui sur ce terrain, il ne se passera jamais rien d’autre qu’une aventure d’une nuit entre vous. Alors qu’il est possible que ce soit plus que cela...
Elle releva la tête, pleine d’espoir. Elle réfléchit quelques instants puis tout son enthousiasme retomba.
- Il ne voudra jamais de moi car il n’obtiendra pas ce qu’il désire… enfin, pas tout de suite quoi.
- Je vais te dire une chose. Il est vrai que les garçons ne réfléchissent pas toujours avec le bon instrument, mais quand le cœur s’en mêle, plus rien ne fonctionne normalement. Je sais de quoi je parle, je t’assure.
Elle me regarda bizarrement. Il est vrai que depuis quelques temps, j’étais bien dans ma tête, et ça ressortait forcément. Mais elle savait qu’au fond, derrière mes airs de timide et de coincé, j’étais aussi quelqu’un de drôle et de… cool.
- Parle-lui. Cela pourrait changer bien des choses.
Elle partit prendre une douche, songeuse, mais apparemment rassurée et décidée. Quant à moi, je me demandais si je devais parler de cette fille à Athénaïs. Après tout, il n’y avait pas de raison que je ne le fasse pas, mais j’avais la nette impression que ce n’était pas une bonne idée. De toute façon, je ne revoyais pas Athénaïs avant demain midi, elle ne pouvait se libérer avant. Elle me manquait, mais il était très difficile de nous voir étant donné nos horaires totalement différents.

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Au boulot, rien ne changeait, Xune ne m’adressait pas plus la parole, apparemment toujours persuadée que je la voulais dans mon lit. Un autre serveur me dit qu’elle était comme ça avec tout le monde, un peu imbuvable, mais au fond pas méchante, une fois qu’on arrivait à casser la carapace de béton qui rôdait autour d’elle. Sans doute avait-il le privilège de compter parmi les personnes qu’elle n’agressait pas, en dehors des clients et du patron. En effet, devant ces derniers, elle était des plus aimables.
"Bonjour, vous avez déjà choisi ?" ou bien "Je vous souhaite un bon appétit". Sans blague, pourquoi elle était comme ça, si explosive, si agressive et sur la défensive en permanence ? Cela en devenait agaçant, et je décidai donc de tenter de l’approcher et de faire partie, moi aussi, de ces personnes avec qui elle avait un vrai contact. Je ne supportais pas d’être en froid avec quelqu’un, si on pouvait appeler cette "relation" de la sorte.
C’est dans les vestiaires que c’était le plus simple et le plus discret pour l’aborder. Je n’avais pas très envie qu’elle se déchaîne sur moi devant tout le monde.
- Alors, tu fais tout ça pour payer quoi au juste ? demandai-je sur un ton qui se voulait neutre.
- Je croyais avoir été claire pourtant, non ?
- Tu pourrais pas arrêter ça deux secondes, c’est bon, je vais pas te manger ni, contrairement à ce que tu penses, te sauter dessus parce que tu me parles gentiment.

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Elle parut surprise l’espace d’une seconde, mais se ressaisit très vite.
- Ok, tu joues la carte de la sensibilité et du bon copain...
- Oh mais c’est pas vrai ?! Tu es comme ça avec tout le monde ?
- Non, juste avec les garçons qui me plaisent et les filles qui se croient belles, lâcha-t-elle en me regardant droit dans les yeux. J’étais abasourdi. Devais-je croire une telle idiotie ? Non, de toute évidence, elle se moquait de moi, encore une fois.
- Ferme la bouche, tu vas finir par baver, me dit-elle en sortant. Je repris mes esprits et la suivis en courant.
- Pourquoi tu te moques de moi comme ça ? Je t’ai fait quelque chose ?
- Je ne me moquais pas de toi, Shan.
- Je n’ai jamais dit que je m’appelais comme ça...
Elle s’était enfin arrêtée… cette fâcheuse manie de discuter en marchant, ou plutôt en courant derrière elle commençait à m’exaspérer.
- Non, tu ne l’as jamais dit, je l’ai simplement demandé.
- N’était-il pas plus simple de me le demander à moi ?
- Non.
Au moins, c’était clair. Alors je lui plaisais ? Non, je ne pouvais pas y croire !
- Sérieusement, il n’y a aucun moyen pour qu’on ait une conversation normale ?
- Ca me paraît difficile.
- Pourquoi ?
- Je te l’ai dit.
- Je te plais ?
- Exact.
J’avais dû louper un épisode.
- Où est le problème exactement ?

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- Tu me plais physiquement, mais je n’ai aucune envie de m’attacher à toi, ni de tomber amoureuse, je n’en ai ni le temps ni le désir. Alors je préfère ne pas te fréquenter.
Sur ce, elle repartit. Moi je n’y comprenais plus rien. Mais tout cela me perturbait assez. Pour commencer, le fait de plaire à une fille aussi jolie, il faut bien le dire, n’était pas vraiment une habitude. De plus, qu’elle ne veuille pas me parler de peur de tomber amoureuse, cela me dépassait totalement. Il fallait que j’en parle, mais je n’étais pas vraiment sûr qu’Athénaïs soit la meilleure personne pour ça, alors je me suis tourné, comme d’habitude, vers celle qui, le plus souvent, savait si bien me conseiller.
- Mouss, je dois te parler d'un truc.
- Aaaah, tu t'es enfin décidé!
- Euh... décidé de quoi?
- A me parler de cette fameuse nuit où je me suis retrouvée seule dans cette grande maison!
- Oooh... mais non! Il s'agit d'autre chose!
- Ah bon... dommage. Quoi alors?
- Au travail, j'ai rencontré une fille et...
- Quoi? Déjà? Tu veux déjà arrêter avec Athénaïs?
- Tu vas me laisser parler oui?
- Vas-y alors!
- Bon. En fait... je sais pas trop comment t'expliquer. Dès la première fois, elle m'a agressé quand je lui ai adressé la parole, et depuis c'est toujours pareil. Je lui ai demandé la raison, et elle me dit qu'elle est comme ça avec les garçons qui lui plaisent.

77

- Ouhhh... toi, attention! C'est comme ça qu'on se fait avoir!
- Non, moi je... enfin, c'est moi qui lui plait et pas...
- Elle ne te plaît pas alors?
- Eh bien... euh... oui elle est jolie mais elle a un fichu caractère!
- Tu veux un conseil? Evite-la!
- Quoi? Mais pourquoi?
- Parce que c'est comme ça qu'on tombe amoureux! Vous allez vous chamailler, tout en vous plaisant mutuellement, et puis vous allez apprendre à vous connaître et tout et tout, ça va finir dans un café devant un verre et puis dans ton lit sous la couette!
J'avais la nette impression qu'elle était en train de dire la même chose que cette fille. Au fond, si elle m'agressait, c'était pour ça, pour ne pas qu'on sympathise. Seulement le problème, c'est que ça me donnait envie de la comprendre et de la connaître mieux.
- Ouais, bon... on verra.
- Cette fois c'est moi qui te dirai "Je t'avais prévenu"!
Puis elle est partie je ne sais où et je me suis retrouvé tout seul avec mes pensées. Mince, qu'est-ce que j'allais faire? Je pouvais pas l'ignorer tout le temps cette fille, ça allait être invivable!
Le soir-même, je suis allé au travail, pourtant décidé à ne pas décrocher un mot à son attention. Mais juste quand je partais, le téléphone sonna. Je me suis donc dépêché de le décrocher, j'allais être en retard au boulot sinon.
- Allô? dis-je précipitament.
- Shan? C'est Ling! Comment vas-tu?
- Ah Ling, ça va, ça va. Mais je suis désolé, je suis un peu pressé là.
- Oh, d'accord. En fait je voulais t'inviter avec ta copine pour que vous veniez manger à la maison, et vous verrez le bébé comme ça un peu plus longtemps.
- Eh c'est gentil! Ce sera avec plaisir si... les parents seront là?

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- Non!
- Alors ce sera avec plaisir. Quand?
- Mercredi?
- Parfait, c'est mon jour de congé!
- Ok, alors mercredi à 19h30, ça va?
- Super! Je te laisse, je vais être en retard. Bisous et à mercredi!
- A mercredi!
J'ai raccroché et j'ai filé dans la voiture. J'ai roulé un peu trop vite mais je suis quand même arrivé un peu en retard. J'ai croisé le regard du patron, qui voulait dire "C'est bon pour une fois" et je suis allé me changer dans les vestiaires. En sortant, j'ai croisé cette fille qui sortait des toilettes.
- Tu es en retard! me dit-elle en se dirigeant vers les cuisines.
Elle avait coupé ses cheveux… elle était encore plus belle qu’avant.
- Tu as quel âge?
Elle s'arrêta et me regarda comme elle savait si bien le faire.
- Cherche! me répondit-elle avant de retourner travailler. Elle m'énervait! J'ai abordé le premier serveur que j'ai trouvé et je lui ai demandé. En fait, elle est jeune, elle a à peine 18 ans. Je lui aurais donné plus, elle est si...
En attendant, le patron me regardait d'un mauvais oeil et je me suis hâté de m'occuper de mes tables. Le reste de la soirée s'est passée dans le calme et je n'ai plus eu droit à un mot de la part de ma collègue. Par contre, les regards fusaient, et se croisaient souvent. Je détestais cette situation.
Dans les vestiaires, je m'en suis tenu à ma décision, et je n'ai rien dit. Elle non plus. Alors nous sommes repartis chacun de notre côté. J'étais un peu déçu, j'avais pensé que mon silence l'aurait incité à parler. Mais non, elle était plus coriace que ça.
Puis, en me dirigeant vers ma voiture, je sentis un bout de papier dans ma poche. Je le sortis et le lus après l'avoir déplié.

25 juillet 2006

- Je vais faire un effort, je te jure, je

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- Je vais faire un effort, je te jure, je m’excuse vraiment.
Je venais de glisser ma main dans la poche de mon pantalon et je sentis quelque chose. Après l’avoir tâté, je crus reconnaître le boîtier d’une bague. Je n’avais donc pas oublié ! C’était sans nul doute peu original comme cadeau d’anniversaire de mariage, mais au moins j’y avais pensé.
- Et puis, j’ai tout de même quelque chose pour toi.
Je sortis la boîte, priant de toutes mes forces pour qu’elle soit belle et à sa taille. Elle ouvrit la petite boîte que je venais de lui donner, et un sourire satisfait éclaira son visage. Elle sortit la bague, posa la boîte et enfila le bijou. Elle se leva ensuite et vint m’embrasser amoureusement.
- Merci mon cœur, viens...
Elle m’emmena à l’étage.
C’est à cet instant que je me suis réveillé. Athénaïs était toujours pelotonnée contre moi. Elle avait l’air satisfait et paisible. Moi, j’étais perturbé, embrouillé et confus.
Du mieux que je pus, je me dégageai de son étreinte, sortis du lit, me rhabillai un minimum et descendis dans la cuisine. Je bus un verre d’eau pour me rafraîchir.
Je ne comprenais pas ces rêves. Et chose plus étrange encore, ils se suivaient, comme une histoire qu’on voulait me raconter. Mais je décidai de garder tout cela pour moi, du moins pour l’instant. Je ne voulais pas gâcher le moment que nous venions de vivre.
J’essayai de me calmer avant de retourner auprès d’Athénaïs, toujours endormie. Au petit matin, elle me réveilla de bonne heure : elle devait partir travailler.
- Ca va ? me demanda-t-elle timidement, visiblement un peu gênée de se retrouver nue dans le même lit que moi.
- Bien, dis-je en l’embrassant tendrement. Et toi ?
Je l’attirai vers moi et la caressai doucement.
- Idem. Mais je dois aller bosser. Si tu veux, tu peux rester ici, prends ton temps, fais comme chez toi, tu n’auras qu’à laisser la clé dans la boîte aux lettres.

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Elle se leva, gardant soigneusement une partie des draps autour d’elle et se dirigea vers la petite salle de bains. Je l’entendis prendre une douche, et elle ressortit environ 20 minutes plus tard, habillée, coiffée, et maquillée, belle comme jamais.
Je l’ai accompagnée dans la cuisine et nous avons mangé ensemble, avant qu’elle ne parte vers son lieu de travail. Je remis une mèche de cheveux en place avant de l’embrasser, elle n’avait aucune envie de partir, mais elle était bien obligée. J’ai été prendre une douche également lorsqu’elle fut partie, et je n’ai pas traîné, je suis rentré chez moi. Je m’attendais à des commentaires de la part de Mouss mais je fus surpris. C’était le silence total à ce sujet.
La journée se passa tranquillement, et mon premier jour de travail approchait à grands pas. J’arrivai à l’heure, pour faire bonne impression, mais je ne trouvais pas la personne qui devait s’occuper de moi. J’interpellai alors une serveuse.
- Excusez-moi, je cherche...
- Vous voyez pas que je travaille là ? J’ai pas le temps de discuter, j’ai 6 tables à servir plus toutes celles du nouveau qui n’est pas là, alors j’ai autre chose à faire que de vous renseigner sur les heures de la poste !
Surpris, je restai interdit quelques secondes. Elle était apparemment débordée, mais si elle m’avait laissé le temps de parler… en fait, je crois qu’elle m’aurait agressé quand même, me disant que je ne foutais rien puisque je n’étais pas encore au travail.
Cette fille m’intriguait, m’effrayait et me plaisait en même temps. Je ne savais pas très bien dire pourquoi, étant donné que je venais de me faire bouffer, mais j’aimais bien les personnes qui savaient ce qu’elles voulaient, au contraire de moi, et là, j’avais un exemplaire remarquable.

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J’ai donc cherché dans la salle quelqu’un susceptible de m’aider, de me renseigner sur la marche à suivre. Je vis la personne à l’accueil qui m’avait donné le rendez-vous le soir où j’étais venu avec Athénaïs. Je me suis donc dirigé vers elle et elle m’a conduit vers le patron, un homme d’une quarantaine d’années, mince, grand et chauve, qui avait l’air fort sympathique et grâce auquel j’étais là aujourd’hui. Il m’indiqua les vestiaires, me donna un uniforme ou tout du moins ce que je devrais porter en service, et m’indiqua le mode de fonctionnement du restaurant.
Deux heures plus tard, je me retrouvais avec quelques tables à ma charge, déjà fatigué étant donné que le restaurant ne désemplissait jamais.
Enfin, quand la salle fut totalement vidée, je suis allé dans les vestiaires où j’ai retrouvé cette serveuse qui m’avait gentiment envoyé balader. Je n’ai pas dit un mot, elle non plus, ne me jetant même pas un regard en biais, ce dont moi je ne privais pas.
Elle sortit sans un mot, et je la suivis, ayant également terminé. Je voulais quand même savoir comment elle s’appelait, après tout j’allais travailler avec elle une bonne partie de mon temps.
- Excuse-moi, tu travailles de...
- Si tu espères des excuses, tu perds ton temps, me coupa-t-elle en continuant son chemin.
Cette fille était pas croyable ! Je ne lui avais rien fait, ni même rien dit, et elle agissait comme si j’avais tué sa mère ! Je ne me rappelais pourtant pas avoir tué quelqu’un récemment.
- Mais enfin, est-ce que je peux savoir avec qui je travaille et ce que je t’ai fait ? dis-je avec un peu plus d’assurance.
Elle s’arrêta enfin et me fit face. Elle me regarda longuement dans les yeux, sans ciller, puis dédaigna me répondre.
- Je m’appelle Xune, et comme tu peux le constater, je suis une fille, je travaille ici depuis 4 ans. Je peux partir maintenant ?
- Euh… Tu travailles quand ?
- Tu me dragues ?
- Non… non pas du tout, je...

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- Parce que si c’est le cas, t’es encore plus mal barré !
- Je voudrais juste savoir quand tu travailles, je suis nouveau, j’ai pas envie de me retrouver seul pendant les pauses sans connaître personne et comme on a échangé quelques mots...
Elle me regarda, pour la première fois, avec un air surpris. Elle soupira, regarda quelques instants ses pieds et enfin me prêta à nouveau attention.
- Je travaille 6 soirs par semaine, j’ai congé le mardi.
- D’accord, moi j’ai congé le mercredi.
- Super. Bye.
Etait-ce normal que je la trouve aussi intrigante qu’intéressante, alors qu’elle faisait tout pour obtenir le contraire ? Toujours est-il que c’est ce que je pensais d’elle.
- A demain, dis-je juste à temps pour qu’elle l’entende. Elle avait disparu au coin de la rue, me laissant seul et déconcerté quelques instants.
Seulement quelques instants, en effet, puisque je la vis revenir deux minutes plus tard. Elle se dirigeait vers moi, avec détermination.
Elle arriva à ma hauteur et m’embrassa non sans entrain.
- Tu me foutras la paix après ça ?
J’étais complètement ahuri. Mais qu’est-ce qu’elle croyait ? Que je la draguais vraiment ? Que je la voulais dans mon lit pour une nuit ? Elle ne manquait pas d’air !
- Je peux savoir pourquoi tu as fait ça ? Je ne t’ai rien demandé.
- C’est évident, c’est ce que tu attendais.
- Ah bon ? Je n’étais pas au courant...
Je ne sais pas pourquoi, mais je me sentais aussi fort qu’elle en cet instant. J’arrivais à lui répondre et à lui renvoyer la balle très facilement, ce que d’ordinaire j’avais un mal fou à faire. Un autre effet bénéfique de ma relation avec Athénaïs ?
- Tu n’as pas arrêté de regarder mon décolleté depuis tout à l’heure alors excuse-moi d’avoir ce genre d’idées à ton propos.
- Ce n’était pas le cas, je voulais simplement faire connaissance avec toi, mais si vraiment c’est au-dessus de tes forces.
- Laisse tomber, me dit-elle avant de s’enfuir en direction du coin de la rue.

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Je crois bien qu’elle n’avait su que répondre à ma dernière phrase. Notre relation commençait fort mais je trouvais ça très amusant. Au moins, ça mettrait un peu de piment dans ce boulot.
Je suis rentré chez moi et je me suis mis directement au lit, éreinté. Et dire que je recommençais demain… Heureusement, pour une fois, ma nuit fut calme, sans ce rêve qui ne me quittait plus depuis quelques jours. Je dormis paisiblement et ça me fit un bien fou.
Nous étions vendredi et Mouss n’avait cours que l’après-midi, alors la conversation que je redoutais eut lieu.
- Alors ? Bien dormi la nuit passée ? me demanda-t-elle avec un petit sourire au coin des lèvres.
- Bien et toi ? dis-je, l’air innocent.
- Oh allez, raconte-moi !
- Je n’ai rien à te raconter ! Tiens au fait, j’y pense, ce fameux pari, je l’ai gagné, alors j’ai droit à mes trois questions ?
- C’est exact, mais ne change pas de sujet.
- Que veux-tu savoir ? dis-je, à moitié exaspéré, à moitié amusé.
- Shan ! Dis-moi simplement comment c’était.
- C’était très bien et je ne t’en dirai pas plus. A mon tour.
- Je connais déjà la première question...
- Alors réponds-y, dis-je avec défi.
- Pose la quand même, si je me trompe j’aurai l’air bête.
- De qui es-tu amoureuse ?
- C’est bien ce que je pensais. De Max, répondit-elle en levant les yeux au ciel.
- Il m’en reste deux. Vous êtes-vous embrassés ?
Elle me regarda dans les yeux, l’air incertain et accusateur, comme si j’étais trop curieux. Puis elle détourna les yeux et attendit quelques secondes avant de me répondre.

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25 juillet 2006

6. Rêves et rencontres

62b

Rentré chez moi, je me suis mis directement au lit, et je me suis endormi tout de suite.
Les jours qui suivirent furent calmes, je n’ai pas revu Athénaïs, à cause de son travail, et elle me manquait cruellement. Le mardi est arrivé, et je me suis rendu à mon rendez-vous. Tout s’est très bien passé, et j’ai obtenu une période d’essai d’un mois, au terme de laquelle je serais engagé ou remercié. De toute façon, je ne comptais pas rester éternellement dans ce restaurant. Une fois que j’aurais repris mes études, je quitterais ce job.
Je commençais jeudi soir, ce qui me laissait mercredi pour voir Athénaïs, si elle était libre. Ce job m’énervait déjà rien que pour ça, je commençais à peine ma relation avec cette femme et il fallait déjà que quelque chose vienne ternir mon nouveau bonheur.
D’un autre côté, Mouss me dit que ce n’était pas non plus une bonne idée d’être scotchés l’un à l’autre tout le temps, et notre travail à chacun nous permettrait de mieux profiter des moments passés ensemble. Je crois qu’elle n’avait pas tort.
La nuit de mardi à mercredi fut teintée elle aussi de rêves vraiment réels.
Je me retrouvais dans une maison moyenne, plutôt jolie. Le jardin était fleuri, les fleurs bordant l’allée menant à la porte d’entrée, et de multiples parfums se mélangeant au vent qui venait effleurer le visage.
Apparemment, je venais de rentrer du travail, et je posais mes clés sur le petit meuble dans le hall d’entrée. J’allais dans la cuisine où je retrouvais Eléonore, enceinte, faisant la cuisine.
- Bonsoir chérie.
- Bonsoir.
Elle avait répondu d’un air distrait, comme souvent quand nous étions ensemble et que je ne l’intéressais pas, n’ayant pas envie de câlins ou d’autre chose venant de ma part.
J’allais alors dans le salon, et je m’installais dans le fauteuil, j’allumais la télé et je regardais d’un œil distrait un jeu idiot qui faisait gagner de l’argent à des gens tout aussi bêtes que le présentateur.

63b

On aurait dit que je n’avais plus aucune envie, sachant que c’était de toute façon inutile vu l’humeur de cette femme dans la cuisine, qui, au vu de l’anneau que je portais au doigt de la main gauche, était mon épouse. Dans ce rêve, je me sentais complètement abattu, alors que je n’avais qu’entre 25 et 30 ans tout au plus, j’avais la sensation de ne plus me battre pour rien.
Eléonore se rendit dans la salle à manger et mit la table, me criant que nous allions bientôt dîner. Mais je n’avais pas faim. Je n’avais envie de rien, sinon de m’enfuir, ce qui reviendrait à me réveiller en réalité.
Quelques minutes plus tard, n’ayant rien suivi du jeu, je m’endormais dans mon fauteuil quand la voix désagréable de ma femme vint me réveiller pour m’ordonner de venir manger.
Nous nous installions, et mangions en silence. Peut-être nous étions-nous disputés, je ne sais pas. En tout cas, dans mon rêve, je n’en avais pas la sensation.
- Tu as passé une bonne journée ? demandai-je, hésitant.
- Qu’est-ce que tu en as à faire de toute façon ? Cela fait bien longtemps que tu ne t’intéresse plus à ce que je fais.
Cette réponse me fit froid dans le dos. En réalité, je me remuais dans mon lit, mal à l’aise, voulant fuir, mais ce rêve si réel continuait.
Pourquoi si peu de communication et de chaleur entre nous alors qu’apparemment, nous étions encore de jeunes mariés, prêts à fonder une famille ? J’en étais effrayé.
- Je voulais simplement savoir si tout allait bien pour toi. Je peux m’inquiéter pour ma femme, non ?
- C’est nouveau ça. J’ai passé la même journée que celle d’hier, la même que celle d’avant-hier ou encore celle d’avant avant-hier. Satisfait ?
- Tu es de mauvaise humeur ? Ou bien j’ai fait quelque chose qu’il ne fallait pas ?
- Tu te fous de moi j’espère ?
Je ne comprenais rien. Ce rêve était si bizarre. D’ordinaire, dans un rêve, on est impliqué, et on comprend ce qui se passe. Mais là, j’avais l’impression d’être entré dans mon corps sans connaître le passé que j’avais eu dans cette vie avec Eléonore.

64

- Excuse-moi, je ne comprends pas, explique-moi ce qu’il y a.
- Il y a que tu es rentré une heure en retard, alors que tu m’avais promis de revenir plus tôt pour notre anniversaire de mariage !
Aïe… Là, je comprenais mieux. Elle avait une bonne raison d’être en colère, mais en même temps, ça ne me ressemblait pas. Pourquoi n’y avais-je pas pensé ? Pourquoi étais-je si indifférent ?
Ce n’est pas cette nuit que je le sus, puisque je me réveillai, en sueur, avec un drôle de sentiment de colère. Je ne savais même pas pourquoi, je ne savais même pas contre qui. Ce rêve avait été si réel que je ne réalisais pas encore que j’étais de retour dans la vraie vie.
Je regardai mon réveil : 4h26. J’ai donc essayé de me rendormir, mais en vain, comme il fallait s’en douter. Comment faire comme si rien n’était ? C’était impossible.
Je suis donc allé dans la cuisine, et je me suis préparé un thé, espérant que ça me calmerait. Le temps que l’eau chauffe, je me suis installé devant la télé. Je suis alors tombé sur la rediffusion du journal, et cette réalité encore plus atroce n’a pas arrangé mon état. J’ai changé de chaîne, et j’ai regardé des clips vidéos le reste de la nuit, oubliant mon thé, mais pas mon rêve.
C’est malgré tout endormi que Mouss me trouva le matin quand elle vint prendre son petit-déjeuner.
- Shan ?
- Mmm ?
- Réveille-toi. Tu es dans le salon.
Peinant à me lever, je réussis quand même à la rejoindre dans la cuisine, mais je m’assis sur une chaise immédiatement. J’étais crevé.
- Ca va ? me demanda-t-elle, l’air inquiet.
- Mouais...
- Comment se fait-il que tu sois dans le fauteuil plutôt que dans ton lit ?

65

- J’ai fait un sale rêve après lequel je n’arrivais pas à me rendormir, alors j’ai été devant la télé et elle a eu un effet bénéfique on dirait.
Je n’avais pas envie de raconter mon rêve à Mouss. Elle allait encore me sortir une théorie pour expliquer que je rêve de mon ex-copine, et je n’en avais vraiment pas le souhait.
J’ai donc changé de sujet, et nous avons discuté d’un tas d’autres choses. Puis elle est partie aux cours, comme tous les jours, et je me suis retrouvé seul.
Je ne savais pas ce que j’allais faire, j’avais envie de voir Athénaïs, mais elle travaillait toute la journée aujourd’hui.
Je me suis alors levé et j’ai cherché mon portable, j’ai tapoté un message et je le lui ai envoyé. Un petit mot pour lui dire que je pensais à elle et que j’avais envie d’être à ses côtés. C’était la première fois que je faisais une telle chose.
Le soir venu, j’ai été chez elle, elle avait envie de me faire à dîner. Nous avons mangé un excellent repas, et passé un agréable moment. Nous savions tous les deux que nous retrouver dans un endroit tranquille et intime était imprudent si nous voulions y aller en douceur, mais je crois qu’au fond, nous avions très envie tous les deux aussi d’être enfin seuls.
Après le repas, on s’est installés dans le divan, devant la télé, mais je dois avouer que nous n’avons pas regardé grand-chose. Je l’embrassais sans cesse, dans le cou, sur la bouche, ses épaules.
Elle s’est alors levée et a pris ma main pour que je fasse de même. Puis elle partit vers la porte, où elle s’arrêta et me regarda.
Je l’ai rejoint, et nous sommes montés dans sa chambre. Là, j’ai pris son bras et je l’ai attirée vers moi, tendrement. Je l’ai regardée dans les yeux, et j’ai senti le désir monter en moi. J’ai caressé doucement ses cheveux soyeux, et j’ai fait glisser ma main le long de sa joue. J’ai effleuré ses lèvres du bout de mes doigts, et ceux-ci continuèrent leur trajet jusqu’à ses hanches.
J’ai alors glissé ma main sous son pull, et j’ai senti sa peau douce et chaude, elle frémissait. Je suis remonté le long de son dos. J’ai approché mon visage du sien et je lui ai donné un baiser long et léger, puis ma langue pénétra dans sa bouche et je l’embrassai alors plus langoureusement. Elle répondit à mon baiser et cela ne fit qu’attiser le désir qu’elle provoquait en moi.

66b

De mes deux mains, je soulevai son pull et le lui ôtai. Je la caressai puis la conduisis vers le lit où nous nous sommes laissés aller doucement. Mes mains caressaient sa peau, son visage, ses lèvres, et je ne pouvais plus me contrôler.
Nous dormions enlacés, tranquillement, après ce moment de tendresse, de câlins et de bonheur. Cette première fois avec elle avait été à la hauteur de nos espérances.
Mais ce rêve recommença, là où il s’était arrêté. Le repas avec Eléonore continuait en silence, nous n’entendions que le bruit des couverts sur les assiettes et celui des volets qui claquaient contre le mur, poussés par le vent qui se faisait de plus en plus fort. Peut-être allais-je savoir pourquoi j’avais été si peu attentionné à l’égard de la femme que je devais normalement aimer.
- Je suis désolé, j’ai été retenu au boulot.
C’était horrible, je ne savais même pas si je disais la vérité, puisque je ne savais pas où j’étais avant d’arriver dans cette maison, ni même si j’avais un boulot et en quoi il consistait.
- Comme d’habitude, je vais finir par croire que tu as une maîtresse tu sais.
Alors c’était ça… et en plus, elle avait peut-être raison. Quelle horreur ! Je trompais vraiment ma femme ? Mais, avec qui ?
- Ne dis pas n’importe quoi. C’est toi que j’aime, je n’ai pas besoin de quelqu’un d’autre.
Je ne me convainquais pas moi-même, c’est dire.
- Tu t’enfonces Shan ! Ne me dis pas que ces plans ont besoin de toi si tard, tu peux faire ça demain non ? Et puis tu n’es pas seul que je sache !
Alors je travaillais dans l’architecture, enfin… ça en avait l’air.
- Non, mais il y a des choses que je suis seul à pouvoir faire, tu comprends ? Je suis vraiment désolé, tu sais bien que quand je suis pris dans quelque chose, tout autour de moi s’efface.
- Et si tu étais un peu plus investi dans notre relation, tu pourrais oublier le reste de temps en temps ?

29 juin 2006

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28 juin 2006

Enfin, je parle d'un garçon, mais ça pourrait

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Enfin, je parle d'un garçon, mais ça pourrait être une fille aussi. Personne ne le sait, à part le médecin. De toute façon, peu importait, fille ou garçon, on l'aimait déjà cet enfant, et c'est aux alentours de midi que ce petit être tout neuf est venu nous dire bonjour.
Après avoir laissé ma soeur et son mari profiter de ce moment de bonheur immense, j'ai été voir leur bébé. J'étais heureux, pour eux, pour moi, pour cet enfant. On a beau y être préparé pendant 9 mois, quand ça arrive vraiment, c'est tellement différent de tout ce qu'on a pu imaginer que c'en est merveilleux et inattendu. J'étais aux anges, devant ce petit être encore tout fripé mais tellement mignon déjà.
Je n'ai malheureusement pas pu rester longtemps, Ling étant fatiguée. De toute façon, on allait avoir toute une vie pour faire connaissance avec ce petit bout.
Encore un peu chamboulé, dans le bon sens du terme, par cet évènement qui malgré tout n'arrive pas tous les jours, je suis rentré chez moi, non sans regrets de devoir les laisser, mais le coeur rassasié de joie et la tête pleine d'images merveilleuses d'une famille unie et heureuse.
C'était l'évènement qu'il me fallait pour me redonner goût à la vie. Si j'avais été seul, sans Athénaïs, je ne pense pas, cependant, que ça aurait eu le même effet. Mais elle était là, alors j'en profitais. C'est ainsi que je me suis retrouvé pendu au téléphone à peine rentré chez moi. Je voulais la voir ce soir!

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- Shan! Ca va?
- Bien et toi?
- Aussi. Je voulais te dire que j'ai passé une excellente soirée hier avec toi.
- Moi aussi. Je voulais d'ailleurs remettre ça ce soir, si tu es d'accord.
- Ce sera avec plaisir.
- J'aimerais te parler de deux choses.
- Oh, c'est même pas pour me voir alors? dit-elle sur un air à moitié déçu et à moitié ironique.
- Bien sûr que si. Mais il y a deux choses que je voudrais éclaircir avant de tomber totalement amoureux.
Comment je pouvais dire des trucs pareils? Je me surprenais moi-même, jamais je n'avais été comme ça avec Eléonore, et ici, ça faisait à peine quelques heures que nous étions "ensemble", et je me croyais déjà en terrain conquis! Cette fille me faisait vraiment faire n'importe quoi. Je ne m'en plaignais pas, c'est vrai.
- Alors on se voit ce soir? dit-elle timidement.
- Oui, je t'emmène au resto, tu veux bien?
- Oui, quelle question!
Je passe la prendre à 20h00. Evidemment, j'ai déjà hâte d'y être! En plus, que vais-je faire pendant ce temps? Si Mouss pouvait être là...
A peine ai-je fini de penser ça qu'elle ouvre la porte.
- Mais quel con ce prof!
- Ah?
- Il arrête pas de nous donner des travaux, comment veut-il que nous avancions dans notre matière s'il ne nous en laisse pas le temps? Grrrrr!
- Oui sinon, moi ça va aussi, je suis tonton depuis quelques heures et tout le monde va bien, rien d'exceptionnel quoi, dis-je l'air tout à fait innocent.
- Tu vas avoir la belle vie en... quoi? Tonton??

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- Je me demandais si tu allais réagir.
- Mais c'est génial! Wouah!!! Oh je suis trop contente pour toi et ta soeur!
- Merci, moi aussi je suis heureux. Ce bébé est tellement mignon! Puis j'ai invité Athénaïs au resto ce soir. J'ai bien envie de savoir une chose importante et de la mettre au courant de ma future situation de travailleur.
- Eh ben Shan, tu fais des progrès. Fini le garçon réservé, sans envie et subissant sa vie?
- Oui, peut-être. En tout cas, elle me donne envie d'être autrement, elle me donne envie de l'aimer et de lui faire passer de bons moments, et tout ça me donne envie d'aimer la vie.
- T'es tombé sur la tête ou quoi? Je ne te reconnais plus!
- Je crois que je suis amoureux.
- Ca te va bien! Et quelle est cette chose que tu veux savoir?
- Eh bien, je t'ai expliqué que hier y a un type qui m'a surpris devant chez elle. Je voudrais bien savoir qui c'est. C'est curieux comme truc, il arrive comme ça, elle est toute contente de le revoir, et ils se revoient après mon départ. Y a de quoi se poser des questions non?
- Oui, tu as raison. Mais fais ça en douceur hein? Ne la brusque pas, sinon elle se fermera comme une huître.
- Bien chef.
Le reste de la journée, je n'ai pas cherché à trouver un travail, trop occupé à me demander comme j'allais bien pouvoir aborder ce sujet avec elle. Puis enfin, l'heure est arrivée, et c'est moins stressé que je me suis arrêté devant la maison de celle avec qui j'allais passer la soirée.
Je suis descendu de voiture et me suis dirigé vers la petite maison. Mais je n'eus pas le temps de sonner, Athénaïs sortit avant, et elle m'embrassa sur le coin des lèvres en guise de bonjour. Elle n'attendit pas ma réaction et fila vers la voiture. Surpris, je mis un temps à la rejoindre, mais ce n'était pas sans un sourire aux lèvres.

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Enfin arrivés à bon port, on est entré dans le restaurant et une personne nous dirigea vers la table que j'avais réservée quelques heures auparavant.
L'endroit était calme, propice à une discussion. Je me suis lancé tout de suite, pour enlever cette boule à l'estomac qui ne me quittait pas depuis tout à l'heure.
- Je voulais te demander quelque chose qui a piqué ma curiosité.
- Vas-y, me dit-elle en me regardant droit dans le yeux, comme si elle savait ce que j'allais dire. Ca ne me mit vraiment pas à l'aise, et je dus détourner le regard avant de commencer.
- Eh bien... je me demandais qui était l'homme qui est venu chez toi hier soir. Je suis un peu curieux, excuse-moi mais...
- Ne t'excuse pas, j'ai même été étonnée que tu ne me le demandes pas plus tôt, dit-elle en riant.
- Je ne sais pas, tu n'en parlais pas, je ne voulais pas te brusquer.
- C'est gentil. Ce garçon s'appelle Jack, c'est un de mes ex.
- Oh...
- Ne fais pas cette tête! C'est un ami à présent, mais il a quelques problèmes. Après notre rupture, une histoire de courte durée, je te rassure, il a rencontré quelqu'un, avec qui il a vécu une longue histoire, parsemée d'embûches et d'obstacles. Mais une belle histoire. Ils s'aimaient énormément. Malheureusement, cette femme avait un cancer. Elle ne le lui avait pas dit.
- ...
- Tu imagines quand elle est décédée, il ne s'y attendait pas du tout, le pauvre. Il a du combiner la colère de n'avoir rien pu faire pour l'aider, puisqu'il n'était pas au courant, la colère aussi qu'elle ne se soit pas soignée, à la profonde tristesse qu'il a éprouvée. Cela fait deux ans à présent qu'elle est morte. Mais il n'a pas de famille, il vivait seul avec sa mère, décédée, elle aussi, quand il avait 20 ans. Alors, après le décès de sa fiancée, il était perdu, et c'est naturellement que je lui ai offert mon aide et mon soutien.
- Je comprends.

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- Ne t'inquiète pas, notre relation est sans ambiguïté, je t'assure. Notre histoire n'a duré que peu de temps parce que nous nous sommes vite rendus compte que ça ne collerait pas en tant que couple.
- Ok.
- Tu m'avais dit que tu avais deux choses à me dire. Je suppose que celle-ci est la première.
- Oui. La seconde, c'est juste que je dois t'informer de quelque chose.
Je lui expliquai alors la situation avec mes parents. Elle savait déjà à qui elle avait affaire, puisqu'elle les avait cotôyés pendant un bon bout de temps à l'hôpital. Elle savait bien qu'ils n'étaient pas des parents exemplaires à mon égard, et elle ne fût pas surprise d'entendre cette histoire d'argent.
- Je vais donc devoir me trouver un petit boulot.
- Tiens, tu as vu l'affiche à l'entrée? Ils cherchent un serveur! Tu pourrais demander!
- Ah? Non je n'ai pas vu. Je ne sais pas, peut-être oui...
- Quoi?
- Rien c'est que... j'ai du mal à me faire à l'idée.
- De travailler?
- Oui, je pensais pouvoir continuer mes études.
- Mais tu vas le faire non?
- Je suppose.

60

- Tu sais, il y a plein de gens qui doivent bosser pour payer leurs études. C'est pas plus mal, ça te permet de garder les pieds sur terre, et puis tu feras des connaissances.
- Ouais... j'irai voir après. Profitons de cette soirée maintenant, je n'ai pas l'impression que c'est notre second rendez-vous là. On devrait être moins sérieux.
- C'est vrai. Mais c'est parce qu'on se connait déjà un peu.
- Je m'en fous, je veux apprendre à te connaître en tant que femme, pas en tant que kiné.
Elle sourit. Mes yeux ne pouvaient quitter les siens plus de deux secondes. Je lui pris la main, et on passa une soirée merveilleuse, encore, à discuter de tout et de rien, à parler de nos vies, de nos expériences et de nos envies futures. Je sentais qu'avec elle, je pourrais faire n'importe quoi. Je sentais que nous pourrions aller loin dans cette nouvelle relation qui nous unissait. C'était tellement différent d'avec Eléonore. Ici, j'avais ma place, j'étais essentiel dans la relation, alors que paradoxalement, avec Léo, c'est simplement parce qu'il fallait être deux que j'étais là. Finalement, je ne comprenais pas pourquoi Léo était restée avec moi. Pourquoi était-elle prête à aller jusqu'au mariage, alors qu'elle ne m'aimait pas, et que moi non plus, je ne l'aimais pas vraiment? Car en cet instant, je découvrais le véritable sens que pouvait prendre le verbe aimer. Et ce n'était pas ce que j'avais vécu avec Léo. Ici, notre relation commençait à peine, et c'était pourtant déjà tellement différent. Je me sentais bien, fort et plein de projet. Je me sentais utile, désiré, aimé pour ce que j'étais, pas pour ce qu'éventuellement je pourrais devenir.
Ma peur de la décevoir avec ce boulot que je devais trouver s'était envolée, car je voyais dans ses yeux que ce n'était pas tous ces aspects extérieurs qui comptaient. Elle voyait en moi ce que j'étais au plus profond, ce que seules ma soeur et Mouss, pour avoir vécu avec moi, connaissaient. Et c'était le plus beau cadeau qu'elle pouvait me faire, la plus belle preuve d'attachement. Je n'osais pas encore parler d'amour, réellement, car nous en étions au second rendez-vous. Mais je sentais si bien les choses, et je pouvais définitivement être moi, que j'avais envie de me laisser bercer par cette quiétude et cette sérénité qu'elle m'apportait.

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La note payée, on était prêts à partir, quand j'ai vu cette affiche dont elle m'avait parlé. Je me suis dit que c'était une occasion comme une autre, alors je lui ai dit de m'attendre à la voiture. Je me suis dirigé vers l'accueil, et j'ai interpellé la personne.
- Est-ce que cette annonce est toujours d'actualité?
- Oui bien sûr, me répondit-elle. Si vous voulez, je vous prends un rendez-vous avec la personne qui s'occupe de ça.
- Ce serait gentil, merci.
- Mmmm... Mardi, 14h, ça vous va?
- Oui, c'est parfait. Merci beaucoup.
- Vous n'avez qu'à venir ici et quelqu'un vous conduira à la bonne personne. Passez une bonne fin de soirée.
- Merci, vous aussi.
Aussi simple que cela. Je n'avais pas encore le job, mais au moins, j'étais sur la bonne voie. Y avait plus qu'à assurer mardi, et c'était dans la poche. J'ai rejoint Athénaïs à la voiture, et je l'ai reconduite chez elle. Cette fois, je n'allais pas laisser passer l'occasion, je ne pouvais de toute façon plus résister à l'envie de l'embrasser. Mais j'avais un pari à tenir, alors j'ai décidé d'être calme. Devant sa porte, j'attendis qu'elle trouve ses clés. Je lui pris ensuite le bras, l'attirai vers moi et lui déposai un baiser tendre et léger sur les lèvres. Elle réagit alors comme dans les films, et ça me fit sourire intérieurement, à la pensée de la réflexion de Mouss.
- Tu veux rentrer prendre un dernier verre? me proposa-t-elle.
Pari ou pas, je ne pouvais accepter cette invitation, parce que je savais très bien vers quoi ça allait nous mener. Je ne voulais pas brûler les étapes, car ça avait trop bien commencé. Aller trop vite aurait tout gâché. Espérant qu'elle ne le prenne pas mal, je refusai donc.
Heureusement, elle était apparemment d'accord, et à son tour, m'embrassa, avant de disparaître derrière la porte de sa maison.
Je suis resté là quelques minutes encore, puis j'ai repris le chemin de ma maison, le coeur léger, l'âme en paix et l'esprit plein de rêves.

28 juin 2006

5. Naissance et renaissance

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Allongé sur mon lit, je pensais à cette soirée. Elle avait pris une tournure inattendue pour moi, et j'avais envie de remercier Mouss pour tout cela. Je serais resté comme ça une éternité. Enfin, peut-être pas, j'avais bien envie de retrouver Athénaïs, au plus vite, mais en cet instant, je pouvais réfléchir, je pouvais rêver, m'imaginer notre prochaine rencontre. Elle me manquait déjà, alors que ça faisait à peine 7h que je l'avais quittée.
Je n'avais pas bien dormi cette nuit, mon sommeil agité de rêves étranges et toutes ces pensées amoureuses ne m'avaient pas permis de récupérer convenablement. Peu importe, je voulais bien payer ce prix-là pour retrouver un peu de bonheur.
Un bruit contre la porte me sortit de mes pensées, Mouss frappait. Je lui répondis qu'elle pouvait entrer. Elle poussa timidement la porte, puis voyant que j'étais bien éveillé et en tenue décente, elle entra franchement.
- Bonjour toi!
- Qui d'autre?
- Quoi?
- Tu dis bonjour moi, à qui d'autre le dirais-tu?
- Hum...
- Oui je sais, c'était lourd.
- Tu fais des progrès, tu t'en rends compte tout seul. L'amour te rend un peu bête Shan.
- Mais qu'est-ce que c'est bien d'être amoureux!
- Oui, enfin quand c'est réciproque, parce que sinon, c'est un peu douloureux tout de même.
- Oui, mais quand ça l'est, c'est... wouah!
- Tu me fais rire. Bon, c'est pas que j'aime pas discuter de tes amourettes, mais je voulais te parler d'un truc.
- Quoi? Tu me fais peur avec ton air sérieux.
- Ben voilà, tes parents ont téléphoné hier soir et...

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- Quoi?
- Ben... ils m'ont dit de te dire qu'ils en avaient marre de payer une maison pour quelqu'un qui ne faisait même plus d'études, alors ils aimeraient bien que tu trouves un moyen pour gagner ta vie.
- Quoi?! Mais...
- Je sais. Mais bon, tu les connais alors on n'a pas trop le choix. S'ils te donnent plus de fric, je pourrai pas assumer le loyer toute seule, plus la bouffe et tout le reste. Mes parents sont pas pleins aux as alors...
- Mais... il faut toujours qu'ils trouvent un moyen pour me pourrir la vie d'une façon ou d'une autre! C'est ma faute sûrement si j'ai été dans le coma pendant 5 mois? Ouais bien sûr, j'aurais pu regarder devant moi mais enfin bon, y a des limites quand même!
- Je sais tout ça Shan. Mais je n'y peux rien, c'est comme ça.
- Super, ça me fait une belle jambe!
- D'un autre côté, ça t'obligera à t'occuper un peu, tu glandes non-stop!
- T'es de leur avis maintenant?
- Mais non, mais j'essaye de trouver des avantages à cette situation!
- Ouais... Et tu proposes quoi?
- Eh bien, c'est simple, trouve-toi un boulot!
- Oui, super simple, hop, je claque des doigts... magie, un boulot me tombe du ciel!!
- Oh ça va hein, fais pas ta mauvaise tête s'il te plaît!
- Ben quoi, j'ai pas de diplôme, aucune compétence, qu'est-ce que tu veux que je fasse?
- Tu es tout à fait capable de travailler dans un café, ou de vendre dans un magasin!
- C'est ça...
- Ce qu'il y a, c'est que tu n'as pas envie. Et tel que je te connais, je suis sûre que tu n'as pas envie en premier lieu parce que ça te gênerait par rapport à ta nouvelle petite copine!
- N'importe quoi!

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- Me prends pas pour une conne Shan. C'est bon, un diplôme, ça dit rien sur la personne, ça dit pas ce qu'elle est, ça dit pas comment elle vit, alors arrête tes salades!
Super, elle avait réussi à me gâcher ma journée! Je venais de me faire jeter par mes parents, et je me faisais engueuler par ma meilleure amie. J'avais l'impression que je venais de me réveiller d'un rêve, et que j'allais apprendre qu'en fait, je n'avais pas passé cette soirée avec Athénaïs. Quelle journée de merde!
- Ok, alors Shan va aller travailler dans un truc pourri pour pouvoir vivre sa vie, dis-je avec mauvaise humeur.
- Qui te dit que ce sera un truc pourri? Et puis y a plein de gens qui doivent travailler dans ce genre de trucs, ils sont pas moins biens pour autant, ou plus malheureux.
- Ouais...
- Ben oui Shan, la vie est pas toujours rose, parfois faut aussi faire des trucs qu'on n'aime pas. C'est ça la vie.
- J'aime pas quand tu me fais la morale.
- Tu ne me laisses pas le choix, tu joues à l'enfant gâté. Je suis d'accord, tes parents ont tort, mais ça, malheureusement, je ne peux rien y faire. Alors on fait avec ce qu'on a. Donc, tu vas te trouver un job, et à la rentrée prochaine, tu reprendras ton année et tu termineras ensuite tes études.
- Ouais... t'as raison. Désolé.
- C'est pas grave. Tu sais, je comprends que ça soit pas facile pour toi en ce moment. Mais je te promets que ça ira mieux. Tu vois, tu as déjà une petite copine, c'est pas négligeable hein?
- Elle n'est pas encore ma petite copine.

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- Oh, dis! C'est juste pareil, non?
- Non, j'ai suivi tes conseils, alors je ne l'ai pas embrassée.
- Bah oui, mais vous savez que vous allez vous revoir et je suis sûre que tu ne te priveras pas pour rattraper tout ça.
- Sans aucun doute! Et puis, elle m'a laissé entendre qu'elle en avait envie aussi, mais je crois qu'elle a été satisfaite qu'on y aille en douceur.
Mouss éclata de rire. J'ai pas très bien compris pour quoi en fait.
- Qu'est-ce qu'il y a?
- Y aller en douceur! C'est bien un truc de feuilleton ça!
- Comment ça?
- Y a qu'à la télé que ça marche ces trucs-là!
- Mais qu'est-ce que tu racontes?
- Tu paries combien qu'au prochain rendez-vous, vous vous sautez dessus? Bye bye les belles résolutions!
- On parie, ok! Si je ne fais que l'embrasser calmement, je gagne. Si je ne peux résister, tu gagnes.
- On parie quoi?
Mais dans quoi je me lançais moi? Je savais très bien qu'elle avait encore raison, mais il ne me plaisait pas de le reconnaître, et voilà, maintenant, je me retrouvais embarqué dans un pari stupide dont je serais de toute façon le perdant, puisque je ne pourrais pas être naturel et suivre mon intuition avec Athénaïs.
- Si je gagne, tu dois répondre à 3 questions que je te poserai, par la vérité n'est-ce pas? dis-je.
- Mmmm... ok! Et si je gagne?
- Je ne sais pas.
- Moi je sais! Une place pour le concert d'Hoobastank en Octobre l'année prochaine. Enfin non, deux, tu viendras avec moi!

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- Qu'est-ce que c'est encore que ce truc?
- Un groupe! Oh t'es nul Shan, tu connais même pas?
- Non, ces derniers temps, je préférais écouter le doux chant des plumes de mon oreiller à l'hôpital.
- Oh ça va hein... De toute façon je suis sûre que tu aimeras.
- Parce que tu crois que tu vas gagner? Tu rêves!
Et comme à l'accoutumée, ça s'est terminé en bataille d'oreillers.
Je devais donc me trouver un travail. Qu'allais-je bien pouvoir faire? Il est certain que je n'avais pas envie. Me retrouver à servir des gens qui n'auront de toute façon aucune considération pour moi... pfff. Enfin, j'avais pas trop le choix, je ne pouvais me permettre de laisser Mouss assumer toute seule, et de toute façon, elle n'y arriverait pas.
Mais avant de chercher de quoi nous faire vivre, j'avais une autre priorité. Maintenant que j'étais lancé, que j'étais plus ou moins sûr de ne pas me planter, je voulais avancer avec Athénaïs. Il fallait que je la revoies, et qu'on passe du temps ensemble. J'étais dans cette relation, je voulais que ça marche.
J'ai donc été dans la salle de bains, je me suis regardé dans le miroir pour voir s'il y avait encore moyen d'arranger cette tête ou si vraiment, je n'avais plus aucun espoir, je me suis déshabillé et j'ai filé sous la douche. L'eau était tiède, Mouss avait encore du prendre le peu d'eau chaude qu'on avait, mais au moins, ça me réveillait. J'ai laissé couler longtemps, si bien que l'eau est devenue totalement froide, mais j'étais tellement plongé dans mes pensées ou plutôt mes rêves que je ne m'en suis pas rendu compte tout de suite. Par contre, quand j'ai réalisé, je peux vous dire que je suis sorti très vite.

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Heureusement, parce que le téléphone sonnait. J'ai remis mon pyjama en quatrième vitesse, et j'ai couru en direction du téléphone. Arrivé à temps, j'ai décroché.
- Allô?
- Shan? C'est Pascal!
- Ah Pascal, ça va?
- Oui, mais Ling est à l'hôpital!
- Quoi? Mais qu'est-ce qu'elle a?
- Shan... tu le fais exprès ou quoi?
- Ah merde! Désolé! Je peux venir?
- Oui mais tu devras patienter dehors. Bon je te laisse, je retourne auprès d'elle, elle a besoin de moi. C'est l'hôpital des Charmes.
- Ok! J'arr...
Il avait déjà raccroché. Moi j'étais tout tremblant. Ma soeur était en train de donner naissance à un petit être. C'est magique! J'en revenais pas, j'allais être tonton. Cette nouvelle vie qui m'était donnée commençait bien. C'était un début plutôt heureux, et je reprenais peu à peu goût à la vie.
J'ai une nouvelle fois foncé dans la salle de bains, je me suis habillé vite fait, tant pis pour l'allure générale, on verrait ça plus tard. J'ai attrapé mes clés au vol, et je suis parti rejoindre ma soeur et mon futur filleul.
Arrivé là-bas, tout s'est passé très vite, finalement. J'ai du patienter, mais l'impatience était tellement grande, que finalement, je n'ai pas vu le temps passer. Je pensais à ce que la vie de ma soeur allait devenir en devenant mère, et puis ce que la mienne allait devenir aussi. C'est vrai, les priorités ne seraient plus les mêmes désormais, un petit être allait prendre de la place, dans ma vie aussi, et c'est avec plaisir que je pensais à tout cela en attendant qu'il pointe le bout de son nez.
Je sentais également que ce petit bonhomme allait nous rapprocher encore plus, ma soeur et moi. Je suis sûr qu'elle sera heureuse de me confier son bout de chou de temps en temps, et ça allait être une raison de plus pour se voir.

8 juin 2006

Une bonne idée ? Waouw !!! Ouh… bon, euh, je dis

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Une bonne idée ? Waouw !!! Ouh… bon, euh, je dis quoi maintenant ?
- Bon alors… je ne sais pas, quand est-ce que ça vous arrange ?
- Pour commencer, si je vais prendre un verre avec toi, tu me tutoies. Je ne suis pas si vieille tout de même !
- Désolé, c’est que…
- C’est pas grave. Disons vendredi ? Ca te va ?
- Oui, oui vendredi c’est très bien.
- Ok ! Génial.
- Alors je passe vous… te prendre ?
On s’est arrangé pour les détails pratiques. Après avoir raccroché, je n’avais qu’une envie : être vendredi.
En attendant, on était toujours aujourd’hui, alors je me suis assis sur le canapé et j’étais dans mes pensées, l’air un peu abruti je crois.
- Bah alors ? Tu la vois vendredi ?
- Hein… ah, oui.
- Ah génial !! Tu vois que tu devais l’appeler ! Elle avait l’air plutôt enthousiaste ou elle a dit oui pour te faire plaisir ?
Elle avait de ces questions tout de même. Sympa quoi, dire oui pour me faire plaisir ! Heureusement que je la connais Mouss, sinon je crois que je me vexerais souvent.
- Elle a dit que c’était une bonne idée.
- Wouh ouh !! Shan va avoir une nouvelle petite amie !
- T’emballes pas trop vite quand même… On va juste boire un verre.
- Oh c’est sûr que c’est innocent tiens ! C’est vrai après tout, on m’invite tous les jours à aller boire un verre, je n’en fais pas une affaire…

44

- Ca va hein… On verra bien.
- Lui saute pas dessus quand même hein!
- Pourquoi tu dis ça??
- Parce que, au premier rendez-vous, ça le fait pas, même quand on a attendu 5 mois.
- Tu insinues quoi là?
- Tu le sais très bien. Me prends pas pour une cruche, quand on y a goûté...
- Dis donc, toi, t’aurais pas fréquenté Max d’un peu trop près?
- Pourquoi ? me dit-elle en éclatant de rire.
C’est qu’elle ne tenait jamais des propos de ce genre avant. Il allait vraiment falloir que je sache ce qui s’était passé durant ces 5 mois. On me cachait des choses, je me posais de plus en plus de questions, et je me faisais de plus en plus d’idées ! S’ils avaient… bouh ! J’aime autant pas y penser!
Le reste de la journée, je n’ai pas arrêté de m’imaginer comment serait ce rendez-vous que j’attendais déjà avec beaucoup d’impatience. J’avais la bougeotte, je me levais, je me rasseyais, j’allais dans la cuisine, puis dans ma chambre, en passant obligatoirement par le salon. Dans une si petite maison, c’est vraiment pénible de faire les 100 pas!
Et puis, enfin, ce foutu jour est arrivé ! Et bien évidemment, le soir venu, ce n’est pas la joie ou l’enthousiasme qui m’ont envahi, mais la peur de ne pas être à la hauteur. Les doutes couraient plus vite que moi, et je me demandais à nouveau ce qu’une fille comme elle pouvait bien me trouver. Heureusement, une fois de plus, la personne qu’il me fallait était là!
- Tu pars quand ? me demanda Mouss en arrivant dans la cuisine.
- Dans une gros quart d’heure.
- Tu y vas comme ça?
- Ben euh… oui pourquoi, c’est pas bien ? Je dois me changer?
- J’en sais rien, mais arrange-toi un peu ! Elle sera habillé plutôt classique, ou plutôt cool?
- J’en sais foutrement rien moi ! Tu crois que je le lui ai demandé peut-être?

45

- Oh oh, ça va ! Je veux juste que tu sois à l’aise de ce côté-là moi, c’est tout.
- Bon, alors qu’est-ce que je dois faire?
Le dernier quart d’heure avant l’heure fatidique a été mouvementé. Mais le résultat n’était pas si mal. Pas de grands changements, mais je me sentais bien.
Un dernier regard dans le miroir, j’ai pris mes clés et j’ai filé dans la voiture. Sur la route, mon cœur battait la chamade, un peu plus au fur et à mesure que je me rapprochais de sa maison.
J’ai bien cru qu’il allait exploser quand je me suis arrêté. Mes jambes ne voulaient plus bouger, et j’ai dû faire un effort immense pour descendre de la voiture. J’avais vraiment l’impression d’être retourné à mes 14 ans, quand j’ai commencé à m’intéresser aux filles. Sauf qu’à cet âge, je n’entreprenais rien. D’ailleurs, je ne serais pas là si ma super amie ne m’avait pas forcé à téléphoner. D’accord, d’accord, je dois bien reconnaître qu’elle a pas eu tort… enfin, on verra à la fin de cette soirée.
Quelques pas plus tard, je me retrouvais figé devant sa porte, fixant la sonnette, sans oser appuyer. Pendant quelques secondes, j’ai eu l’impression d’être ailleurs. Qu’est-ce que je faisais là ? Ca faisait à peine un mois que je m’étais fait plaquer par ma future femme, et je me retrouvais ici, devant la porte d’une femme que je ne connaissais presque pas, mais à qui je tenais déjà énormément.
Puis, mon esprit est revenu à lui, et je me suis dit que si elle m’avait vu, elle allait me prendre pour un taré. Pourtant… je ne sonnais toujours pas. Et le pire qui pouvait arriver est arrivé.
- Vous cherchez quelque chose ? me demanda une voix derrière moi.
Cette personne, un jeune homme à la trentaine, voulait ma mort, pas possible autrement ! J’étais déjà mort de trouille, il voulait que je fasse une crise cardiaque ou quoi?

46

Ah j’avais l’air bien là ! Bravo Shan ! Si ça se trouve, il t’observe depuis… depuis que tu es devant la porte comme un con.
- En fait, je venais voir Mademoiselle… enfin, Athénaïs.
- Oui je vois bien. Je viens ici aussi.
C’était qui ce type ? Merde, elle avait quelqu’un ? J’avais vraiment l’air encore plus idiot. Je n’avais qu’une idée, partir, mais Athénaïs arriva avant que j’ai pu me retourner.
- Ah Shan ! Tu es là depuis longtemps?
- Depuis un moment, répondit l’autre à ma place.
S’il y a bien quelque chose que je déteste, c’est qu’on réponde à ma place ! J’en ai fait les frais à ma sortie du coma, ça suffit!
- Tiens, Jack ! Qu’est-ce que tu fais là ? Tu m’as manqué!
Ok… bon Shan, fous le camp, je sais pas ce que c’est que ce truc mais...
- Mais tu tombes un peu mal, j’allais sortir, Shan m’a invitée à prendre un verre. Tu te souviens de Shan n’est-ce pas?
- Comment l’oublier, tu n’as pas arrêté de m’en parler!
Super… tout le monde se connaît sauf moi qui ne connais personne. Je sais même pas qui est ce mec, et j’espère me tromper.
- Bien alors je peux passer tout à l’heure ? demanda-t-il.
- Oui, je t’appelle dès qu’on rentre.
Ce type est reparti comme il est arrivé, et je me suis retrouvé seul avec elle. Ce n’était pas tout à fait ce que j’avais imaginé. J’aurais voulu être un peu plus à la hauteur, mais comme à mon habitude, j’avais tout fait rater. Je voulais mener ce rendez-vous pour lui montrer que je n’étais pas le gamin qu’elle devait sûrement imaginer, lui montrer que j’étais un homme, comme les autres. Mais non… c’est elle qui prit les devants, et Shan qui suivit comme un enfant. J’avais vraiment honte. Pourquoi diable avais-je pris ce téléphone?

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Toujours est-il que je l’avais pris, et que je me retrouvais avec une femme qui ne me donnait qu’une envie : la prendre dans mes bras et l’embrasser. Elle me donnait des sensations que j’avais oublié depuis longtemps, ou en tout cas dont je ne me souvenais pas. Il m’était difficile de me contrôler, mais ma timidité et mes peurs m’aidaient à rester en place. Si je n’avais écouté que mon corps, je ne serais pas à la suivre, me dirigeant vers la voiture. Si je n’avais écouté que mon cœur, je lui dirais tout ce que je ressens. Mais je n’écoutais que ma raison, alors je la suivais bêtement.
Arriverai-je à dépasser ces peurs qui me retiennent pour un bon nombre de choses ? De toute façon, pour aujourd’hui, c’était mieux. Mouss m’avait bien dit de ne pas être trop entreprenant le premier soir. Mais comment allais-je résister toute la soirée ? Ma raison était le plus souvent la plus forte, mais parfois, le corps décide de ne pas suivre. Je voulais tant être à nouveau aimé, être près d’elle, dans ses bras, contre elle. Je voulais la toucher, la sentir, lui donner des sensations ou des envies.
Seulement ce soir, je devais rester sur ma chaise, ne pouvant que la regarder. Ce n’était déjà pas si mal me direz-vous. Après tout, avant, je ne tentais même pas de la regarder, étant dans une position de faiblesse et elle faisant son travail.
Dans la voiture, je n’osais dire un mot. De peur d’être ridicule, encore une fois, mais aussi parce que il n’y avait qu’une seule idée qui voulait sortir : qui était ce garçon. Seulement je ne pouvais me permettre d’être aussi indiscret, et elle n’en parlait pas. Alors je préférais me taire.
Heureusement, elle rompit le silence à deux ou trois reprise. En plus, ce n’était pas malin de me comporter de la sorte : je l’invitais puis je ne disais pas un mot, ça faisait plutôt cloche. Mais le chemin n’était pas long, j’allais pouvoir me concentrer pour entamer une conversation.

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Enfin arrivés, on est allé dans un café que Mouss m’avait conseillé. Je ne connaissais pas l’endroit personnellement, mais ça avait l’air sympa. Tout ce que je voulais, c’était de pouvoir la regarder, lui parler tranquillement et lui faire passer la meilleure soirée possible.
Miracle, j’ai réussi à commencer une discussion sur laquelle nous avons amplement dévié, et on s’est retrouvé à 1h du mat’ en train de rigoler comme des fous sur des bêtises d’enfants. J’aurais voulu que ce moment dure une éternité. J’étais bien là, je n’avais finalement pas besoin de plus, la voir rire, sourire, passer un bon moment, cela me suffisait largement pour être, si pas heureux, du moins, moins malheureux. Mais il a fallu qu’elle regarde sa montre. Et tout s’est écroulé.
- Oh mon dieu, tu as vu l’heure ! Il est temps qu’on rentre non?
- Tu crois ? Moi je resterais bien ici encore longtemps.
Ca y est, j’avais mes repères, j’osais plus ! Je me sentais trop bien, j’étais super content de la soirée que nous venions de passer, alors pourquoi fallait-il tout arrêter aussi brusquement?
- Moi aussi j’ai passé une bonne soirée, me dit-elle en me prenant tendrement la main. Mais il faut bien que nous allions dormir, on ne peut pas rester éternellement ici.
- Oui, tu as sans doute raison. Je te ramène.
- Bah oui, j’ai pas trop envie de faire le chemin à pied, répondit-elle en riant.
Faut dire aussi que je suis bête ! Forcément que je la ramène, je vais pas la laisser ici, idiot!
Chemin retour, nous voilà devant chez elle… le moment que je redoutais : je suis entreprenant ou pas?

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Une seconde, deux vies
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